mercredi 23 octobre 2019

Tarantino vs La censure chinoise



Vendredi 18 octobre, le Hollywood Reporter annonçait que la sortie de Once Upon a Time... in Hollywood en Chine, prévue pour le 25 octobre, avait été annulée sur décision des autorités chinoises. Si les raisons qui ont présidé à ce changement abrupt de planning n'ont pas été clairement énoncées, certaines sources proches du dossier pointent du côté de la représentation qu'a faite Quentin Tarantino de l'acteur chinois et maître d'arts martiaux Bruce Lee dans son film.

Tarantino avait été vivement critiqué par la fille de l'acteur, Shannon Lee, pour une scène où son père, ridiculisé, se bat contre le personnage de Brad Pitt, Cliff - qui prend l'avantage. Le réalisateur s'était défendu en arguant qu'il n'avait fait que dépeindre l'arrogance bien réelle de Lee et que Cliff était un personnage fictif auquel on pouvait prêter des qualités supérieures à celles de son adversaire. En amont de la sortie du film en Chine, Shannon Lee aurait alors adressé une demande de modification de la scène à l'administration en charge du cinéma sur le territoire chinois.

L'annulation de la sortie de Once Upon a Time... in Hollywood a lieu dans un contexte de contrôle accru des "produits de divertissement", tant étrangers que nationaux, alors que la Chine voit son autorité défiée par la révolte du peuple de Hong Kong. Le film One Second de Zhang Yimou (La Cité interdite) avait déjà fait les frais de cette ingérence plus tôt cette année : situé dans la Chine protestataire des années 1960, il avait été interdit de participation aux festivals internationaux. Au mois de juin, la projection du film épique de Guan Hu, The Eight Hundred, avait quant à elle était annulée la veille de son avant-première au Festival de Shanghai, dont il devait faire l'ouverture.

Les producteurs du dernier film de Tarantino comptaient sur sa distribution en Chine, estimant que le marché chinois aurait permis à Once Upon a Time... in Hollywood de dépasser les 400 millions de dollars de recettes - le film en a jusqu'ici généré 366 millions. Toutefois, Tarantino n'a pas l'intention de renvoyer son film en salle de montage, d'après les informations du Hollywood Reporter, qui n'a pas obtenu de réaction de la part de Sony Pictures Entertainment, qui détient le film.
Dans les contrats que signe le cinéaste avec ses producteurs et distributeurs à chaque nouvelle réalisation, une clause stipule que Tarantino détient les droits sur le final cut. Sans son accord, aucun changement n'est donc possible. Or la Chine n'obtiendra probablement pas satisfaction tant qu'elle se refusera à communiquer les raisons précises de l'annulation de la sortie du film.
La distribution du film aurait pourtant marqué la première sortie digne de ce nom d'un film de Tarantino dans le pays, après la sortie ratée de Django Unchained en 2012 : les scènes jugées trop violentes avaient été coupées - avec l'accord du réalisateur -, retardant d'un mois une sortie qu'avait court-circuitée le trafic d'une version pirate.

Source: Les Inrocks

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